La Vaujany 2018, ma revanche…

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Ma première et dernière participation à la Vaujany remonte à son édition 2016. Pris dans une chute collective, j’avais clos cette première expérience au centre hospitalier universitaire de Grenoble avec trois côtes et le bassin fracturés. Et depuis je ne pouvais rattacher cette belle cyclosportive qu’aux seuls souvenirs de cette chute collective. Il fallait donc que je revienne sur la Vaujany pour ne pas rester sur une cabriole. Mon calendrier cyclosportif 2018, m’offrait cette opportunité. Je n’ai donc pas réfléchit bien longtemps avant de m’inscrire dès le mois de novembre sur cette nouvelle édition. Les jours qui ont précédé la Vaujany furent chargés. Tout a commencé par ma participation au Super Gran Fondo Galibier Izaord le week-end précédent. j’ai ensuite enchaîné quelques ascensions avec Nathalie : le col du télégraphe, le col de Chaussy par les Lacets de Montvernier depuis Valloire, puis de nouveau le Galibier. Le programme n’était certes pas favorable à la récupération, mais lorsque l’on vient du pays de la brie où ne pousse que les betteraves ou les céréales, il faut mettre à profit chaque jour passé en montagne pour gravir des cols. La récupération pour « performer » sur l’épreuve suivante n’est plus la priorité. La passion l’emporte alors sur la raison. C’est donc avec un peu de fatigue, mais beaucoup de bonheur, que nous avons quitté la vallée de la Maurienne pour celle de l’Oisans en passant par le très beau col du Glandon.

Le parcours proposé depuis quelques années sur la Vaujany comprend deux boucles se rejoignant sur un tronçon commun entre le lieu-dit « Les Travers » et le carrefour entre les départementales 526 et 44. D’une longueur officielle de cent soixante-quinze kilomètres, il affiche une dénivelée positive de trois-mille huit-cent cinquante mètres. Les difficultés sur ce parcours sont au nombre de quatre : Le col de la morte (Alpe du Grand Serre) par Séchilienne, Le col d’Ornon par Entraigues, le Col de Sarenne par Villard-Reculas et l’Alpe d’Huez et enfin la montée sur Vaujany via la route du col du Sabot.

Le parcours de la Vaujany édition 2018.

Il est un peu plus de six heures et trente minute ce 1er juillet 2018, lorsque je quitte notre appartement loué sur Vaujany. L’horizon s’illumine d’un halo rougeoyant et Vaujany sort tout juste de la nuit. La température, qui n’excède pas douze degrés Celsius nous saisie agréablement. Nous sommes trois au quatre concurrents à nous élancer dans la descente vers le barrage hydroélectrique du Verney. La ville est encore endormie et seul le cliquetis des dérailleurs vient troubler le silence absolu et pénétrant de la montagne.

La vue sur la vallée est sublime ! Les premiers rayons du soleil qui se lèvent illuminent les sommets enneigés alors que la vallée et les villages perchés restent dans l’ombre des crêtes des Grandes Rousses. Le ciel parfaitement dégagé prend des nuances très pâles sous l’effet de la réverbération de la neige. Plus bas, le lac du Verney a l’aspect d’un miroir sombre et reflète les premières lueur de l’aube dans une teinte argentée. Cette luminosité particulière est un enchantement ! Comment ne pas s’arrêter devant tant de beauté pour profiter de cet instant fugace et merveilleux…

Au bas de la descente, je tombe nez à nez avec Sylvère Mory. Membre de la « Team Cyclosportissimo ». Nous suivons respectivement nos exploits sur facebook. Ces rencontres entre passionnés sont toujours des instants de plaisir. Après quelques échanges, nous rejoignons notre sas de départ. Le coup d’envoi de cette nouvelle édition de la Vaujany est donné à sept heures et quinze minutes.

Comme d’habitude sur cette épreuve, l’allure des premiers kilomètres est rapide et bien au-dessus des vitesses habituelles. Cela s’explique par le profil de cette première partie de parcours de plus de vingt-trois kilomètres qui nous emmènera jusqu’à Séchilienne et le pied du col de la Morte. En effet, mis à part un petit « raidar » et quelques portions montantes le profil est plutôt en faux-plat descendant sur de belles routes qui rendent bien. La partie comprise entre le Barrage du Verney et Séchilienne est la portion de tout les dangers. Chaque changement brutal de trajectoire à plus de quarante kilomètres par heures peu déclencher des chutes, voire une chute collective ! C’est ce qui s’était produit en 2016.

Le viaduc sur le lac de retenue du barrage du Verney est rapidement franchi sous les crépitements des appareils photos du photographe de l’organisation. La côte surnommée « les Travers » à la sortie du viaduc ne jouera même par son rôle de sélection à l’avant du peloton, où je me trouve. Tout le monde monte sans fléchir. J’y bats même un nouveau record personnel sur ce segment « Srava ». Il n’y a pas encore de groupes vraiment constitués à l’avant. Par contre bon nombre de concurrents essayent de remonter vers la tête pour être en bonne position. Cela contribue à maintenir une vitesse élevée et à créer une certaine nervosité. Le hameau de la Voulte est rapidement laissé derrière nous et la vitesse ne faiblit pas, bien au contraire. La température encore fraîche rend l’effort très supportable et chacun fait le travail pour tenir sa place dans le groupe. L’arrivée sur le hameau de Rochetaillée annonce le début de la longue descente sur Séchilienne. Quelques riverains sortis sur le pas de leur porte nous encouragent.  Nous mettrons onze minutes pour atteindre Rioupéroux avec une vitesse moyenne de plus de cinquante kilomètres par heure. Comme le dit le dicton – « Chat échaudé craint l’eau froide » et à l’approche du Livet et du passage de la D1091 en deux fois deux voies, j’observe le comportement des leaders devant pour anticiper toutes les attaques et ne pas me faire surprendre par les changements intempestifs de file des autres concurrents. Nous rejoignons sans encombre Séchilienne ! Les grimpeurs vont pouvoir mettre en oeuvre leurs capacités pour commencer la sélection.

Relive ‘Sortie à vélo matinale’

Le col de la morte n’est pas un col difficile. Mais il a le privilège d’être le premier « Grimpeur » de ce sublime parcours. Long d’un peu plus de quinze kilomètres, il offre une pente moyenne de plus de six et demi pour cent avec une pente maximale de plus de neuf pour cent. 

Le profil du col de la Morte.

Dans la première moitié de l’ascension, je suis rejoint par Silvère. Il accompagne Véronica qui souhaitait participer à une première cyclosportive montagnarde. Nous échangeons quelques mots. Grenoblois d’origine, il est bien plus aérien que moi, et surtout sa préparation pour de grands événements à venir : Marmotte des Alpes, Raid Extrême Vosgien en équipe, 7 majeurs, Tour du Mont Blanc, Race Across France font qu’il est bien plus affûté et entraîné que je puis l’être. Après quelques instants, il repart vers l’avant et je n’essaye même pas de le suivre. Je poursuis mon effort vers le sommet que j’atteins après une heure et vingt minutes d’effort. Première photo pour Nathalie et le live sur Facebook…

Premier col

La descente vers le pied du col d’Ornon et le premier point de ravitaillement solide à Valbonnais propose un profil où se mêlent des segments en descente et en montée. Je roule maintenant au sein d’un petit groupe d’une dizaine d’éléments. L’ascension sur l’Alpe du Grand Serre a fait office de sélection. Nous mettrons un peu moins d’une heure pour rejoindre Valbonnais. Le soleil est maintenant bien haut et la température monte progressivement. Pour l’instant ses vingt-trois degrés ne gênent pas encore notre progression. J’absorbe mon traditionnel casse-croûte au fromage et repars aussitôt après avoir complété mes bidons. Comme souvent après un ravitaillement, les groupes explosent et parfois disparaissent au profit d’une longue file de concurrents espacés de quelques centaines de mètres. Nous voici maintenant au pied de la deuxième difficulté de la journée : le Col d’Ornon. son ascension de plus de quatorze kilomètres peut être scindée en deux parties. La première d’Entraigues à La Chalp que l’on pourrait décrire comme un long faux-plat montant de plus de neuf kilomètres. Ensuite viennent les pentes les plus physiques qui oscillent sur plus de cinq kilomètres, entre six et plus de sept pour cent.

Le profil du col d’Ornon

Je progresse à mon rythme d’autant qu’à mi-pente ma contracture du fessier droit refait parler d’elle. J’essaye de bien m’hydrater et de rouler souplement pour qu’elle reste à l’état d’une simple gêne. Mais dès que la pente repart à la hausse elle empire. Par bonheur les phases en danseuse me soulagent un peu. Passé le neuvième kilomètre les résineux s’installent dans les paysages et alternent avec les prairies. Malheureusement, les grands arbres ne nous protègent pas de leur ombre et la chaleur commence à bien monter. Nous laissons derrière nous les quelques hameaux le Chalp, Chantelouve, Villelongue, Les Sciauds. Quelques riverains nous encouragent quand d’autre préparent le barbecue du midi. Nous entamons la montée des derniers lacets et atteignons le Col d’Ornon. Et de deux…! Mais le plus difficile est encore devant nous. Mais comme à mon habitude je n’esquive pas mais prends les difficultés les unes après les autres.

Le Col d’Ornon.

Je connais bien la descente du col d’Ornon pour l’avoir gravi lors de mes séjours précédents dans l’Oisans. Je m’y élance donc en terre connue, tout en souplesse et en essayant de mouliner pour détendre mes muscles. Elle autorise quelques pointes de vitesse qui me permettent de reprendre quelques concurrents. Je négocie facilement les lacets du Rivier puis de la Poutuire. Je laisse sur ma droite la commune de Villard-Notre-Dame. Elle est surtout connue dans le monde entier pour sa mine dite de La Gardette où ont été trouvé de magnifiques groupes de cristaux de quartz. Nous n’avons guère le temps de visiter la mine ou de profiter du torrent de la Lignarre. Le hameau de la Palud annonce déjà l’arrivée sur le Bourg-d’Oisans et la D1091.

Nous virons à gauche sous la protection des signaleurs. La grande ligne droite entre le Bourg-d’Oisans et Rochetaillée nous permet de reprendre un peu de temps sur le chronomètre, même si nous avons plus de deux heures d’avance sur la barrière horaire pour atteindre le hameau des Travers. Mais reprendre du temps, c’est aussi le moyen de franchir la ligne d’arrivée plus rapidement. Dès Rochetaillèe, nous virons à droite en direction d’Allemont et après quelques hectomètres nous virons de nouveau à droite et atteignons de nouveau le hameau de la Voulte. La première boucle est bouclée. Nous avons déjà parcouru cent kilomètres. La chaleur atteint maintenant les trente degrés. Aussi, l’organisation a mis en place un ravitaillement en eau improvisé. J’en profite pour m’asperger à la fontaine et repars pour la troisième ascension du jour, celle du col de Sarenne via Villard-Reculas et l’Alpe d’Huez. J’ai scindé cette ascension en trois étapes. La première me mènera jusqu’au pas de la Confession, la seconde jusqu’au sommet de l’Alpe d’Huez et le point de ravitaillement et la dernière me conduira au sommet du col de Sarenne.

Le profil du col de Sarenne

La montée sur le Pas de la Confession s’avère compliqué pour moi. Dès que la pente repart à la hausse, la gêne dans le fessier droit se transforme en douleur. Je suis contraint de stopper plusieurs fois pour tenter de m’étirer de faire passer la douleur. Si cette dernière se calme parfois cela ne dure guère longtemps et tout au plus quelques dizaines de mètres. Je progresse malgré tout à mon rythme et bien souvent au mental. A Villard-Reculas, je retrouve l’équipe médicale qui m’avait médicalisé lors de ma chute en 2016. Le médecin me reconnais ! Nous évoquons les suites de ma chute et ma reprise des premiers entraînements un peu plus d’un mois après ma fracture du bassin. Après avoir complété mes bidons, je repars vers l’Alpe d’Huez. Jusqu’à Huez le profil de la route m’offre de nombreuses occasions de récupérer. Mais dès Huez, nous rentrons de nouveau dans le dur et la chaleur nous assèche de ses quarante degrés. La circulation est soutenue et les odeurs de gaz d’échappement sont vraiment désagréables. Par bonheur, cinq kilomètres plus haut nous virons à droite en direction du quartier dit des Bergers. Malheureusement la pente ne faiblit pas, la chaleur non plus. Nous montons à deux en essayant de nous encourager. Le ravitaillement de l’Alpe d’Huez est le bienvenu. Manger et surtout boire devient une priorité.

Je passe le contrôle inopiné en aval du ravitaillement et m’élance dans la dernière portion de l’ascension du col de Sarenne. Passé l’aérodrome, la pente redevient descendante. J’en profite pour récupérer en restant très vigilant car cette descente est relativement technique avec de nombreux à pic sans parapet sur une route parsemée de gravillons. Un petit groupe s’est formé et nous franchissons les passages les plus délicats avec prudence. Dès le franchissement de la Sarenne, la pente repart à la hausse. Les deux derniers kilomètres sont harassants. La pente y dépasse parfois les dix pour cent et les gravillons nous font parfois patiner lorsque nous nous mettons en danseuse. Nous atteignons enfin le Col de Sarenne.

Comme annoncé au sommet par l’organisation, la descente du col de Sarenne vient d’être récemment gravillonné. Il est ainsi impossible de prendre de vitesse sans risquer d’aller à la faute à chaque entrée de courbe. En temps normal cette descente est déjà technique avec une route étroite et sinueuse sans parapet. Alors y rajouter des gravillons n’est pas pour nous arranger. Au diable le chronomètre, nous devons avant tout arriver sans dégâts. Nous laissons le Perron derrière nous et contournons la Combe du Planuel. Dès Clavans-le-Haut la situation s’améliore. Je reprends un peu de vitesse et arrive à lâcher enfin les freins. J’atteins et dépasse rapidement Clavans-le-Bas. Je lâche mes camarades et poursuis ma route vers le barrage du Chambon. Je roule maintenant sur la D1091, enfin soulagé de retrouver une route bien plus roulante…

Je connais parfaitement cette portion de route jusqu’au Bourg d’Oisans. Jusqu’au Clapier, les montées succèdent aux portions en descente et les tunnels viennent ralentir un peu notre progression. Au tunnel des Commères d’agréables souvenirs me reviennent à l’esprit et notamment de bonnes parties de rigolade avec ma coach lorsque nous cherchions pourquoi les Commères ? Mais les tunnels sont souvent accompagnés de rampes en dénivelée positive et dès que la route remonte la douleur dans le fessier revient. A contrario, dès que le profil redevient favorable elle se fait oublier et me permet de retrouver une petite pointe de vitesse. À partir de Le Clapier nous entrons dans la longue ligne droite vers le Bourg d’Oisans. Le vent de face nous cueille dès le début sous la forme d’une brise. Parfois des rafales avec de grosses bouffées de chaleur sèche viennent nous oppresser. La température atteint les quarante degrés. La traversée du Bourg d’Oisans est assez rapide. Il en est de même de la longue ligne droite qui me sépare de Rochetaillée. Au hameau de la Voulte, je profite de nouveau de la fontaine pour me tremper les pieds qui souffrent de la chaleur depuis des heures et notamment de feu au pieds. Je repars pour la dernière difficulté, la montée sur Vaujany.

Au pied de la montée j’appelle ma coach pour la rassurer, j’arrive ! Mais je sais que cette dernière montée va être particulièrement difficile. Du fait de la pente, de la chaleur et de ma contracture.  Monter au mental reste ma seule alternative. Par bonheur, quelques fontaines sont réparties tout au long de la montée. A chaque halte pour m’asperger et remplir mon bidon, j’essaye de m’étirer mais ça ne fonctionne plus. Dès la remontée sur le vélo, la douleur revient. Je m’enferme dans ma bulle et monte à mon rythme. Mètre par mètre je passe chaque courbe, chaque rampe. La montée devient un véritable supplice. Je continue et arrive enfin à Vaujany.

Je clos le parcours en neuf heures et treize minutes de temps de déplacement. Malgré la contracture, je suis satisfait ! La Vaujany sera maintenant rattaché à cette édition 2018 et non plus à ma chute de 2016 qui demeurera à tout jamais inscrit dans ma mémoire comme un simple fait de course. Lors de cette épreuve j’ai battu neuf records personnels sur des segments STRAVA. En sept jours, j’ai gravi 13.722 mètres de dénivelée positive.

Je dois maintenant récupérer pour ensuite préparer l’épreuve phare de ma saison 2018, la Marmotte des Pyrénées, mais cela est une autre histoire…

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