L’Aspin premier col de ma saison 2019.

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Il y a quelques mois, lorsque « ma coach » m’a proposé un séjour de trois semaines à Bagnères-de-Bigorre, j’étais enthousiaste. Mais être enthousiaste n’empêche pas de rester réaliste ! Ainsi, si je pouvais envisager gravir quelques petits cols situés sous la limite pluie-neige, il me semblait absurde d’envisager de gravir en pleine saison hivernale les grands cols Pyrénéens (Tourmalet, Aubisque…). Aussi, j’étais loin de me douter de l’ouverture précoce du col d’Aspin. Cette dernière, sans doute liée à la période très douce du mois de février, est une occasion qu’il faut savoir savourer à sa juste valeur et qu’il ne faut surtout pas gâcher, car en montagne tout peut changer très vite. L’ascension de l’Aspin a dont été le premier acte de ce séjour Haut-Pyrénéen.

L’ascension du col d’Aspin depuis Bagnère-de-Bigorre commence par un long faux plat montant treize kilomètres qui mène jusqu’à Sainte-Marie-de-Campan. La pente varie de deux à trois pour cent et présente quelques « raidars » à neuf pour cent qui viennent un peu durcir cette première partie du parcours. L’absence d’effort important en tout début de parcours permet de profiter des paysages tout en s’échauffant tranquillement. 

La météo du jour est assez changeante, avec des passages pluvieux entrecoupés de belles périodes ensoleillées. A l’approche d’une large zone ensoleillée à l’horizon, je décide de partir avec la pluie pour essayer de finir l’ascension de l’Aspin avec le beau temps. La pluie m’a effectivement accompagnée jusqu’à Campan. Une belle pluie fine et pénétrante sous un ciel de plomb. La pluie est souvent crainte en vélo, mais rouler en montagne en sa compagnie est une bonne façon de s’endurcir et d’apprendre à l’apprécier ou tout au moins à faire avec. Et lorsque le temps est changeant, les couleurs et les variations de luminosité sont merveilleuses. Elles oscillent entre le gris foncé et le bleu, entre la pénombre et la clarté. Il faut alors lever la tête pour profiter de ses changements éphémères de nuances, des rayons de soleil qui percent à travers les nuages et illuminent les sommets enneigés. De ces nuages sombrent qui deviennent peu à peu cotonneux pour disparaître ensuite. De la route humide qui devient brillante sous l’effet du soleil rasant. Ayant eu le plaisir de beaucoup naviguer à la voile et de gravir de nombreux cols montagnards, je n’ai jamais rencontré d’aussi beaux changements de luminosité et de teinte des paysages qu’en mer et en montagne. Les montagnards et les marins me comprendront. 

A Sainte-Marie-de-Campan, je laisse la route du Tourmalet sur la droite et poursuit tout droit en direction de Payolle et de l’Aspin. La pente se redresse un peu. Elle s’accentue encore à l’approche de la Séoube et du plateau de Payolle. Je pensais trouver beaucoup de neige sur Payolle, mais il en est rien. Quelques névés apparaissent sur le bord de la route un peu avant Payolle. Des plaques plus importantes apparaissent ensuite çà et là sur le plateau. Mais les paysages n’ont rien à voir avec les immensités neigeuses que l’on s’attend à trouver en pleine saison hivernale. Passé Payolle, le profil de la route change. La pente s’élève maintenant à neuf pour cent de moyenne. Et les deux kilomètres suivants évolueront entre huit et sept-et-demi. Cette première séance devait servir de test d’évaluation de ma condition physique et mentale. J’ai donc décidé dès la veille de gravir ce premier col de l’année sur la « plaque » (grand plateau). Les puristes me diront que cet exercice est inutile et consommateur d’énergie. Mais ce beau challenge visait essentiellement à valider ma préparation physique hivernale. Dès les plus grands pourcentages la cadence et la vitesse tombent, mais je tiens plutôt bien. Je passe même les longues portions à dix pour cent à la force physique sans être obligé d’aller chercher des ressources mentales.

Dès les premières rampes de cette seconde partie de l’ascension, les paysages changent. Les prairies partiellement enneigées du plateau de Payolle disparaissent au profit d’une belle forêt d’épicéas. La route est belle et rend bien. La gravir est un pur plaisir. De beaux lacets font leurs apparitions et s’enchaînent. Je retrouve tous les charmes des belles ascensions. Le sommet est encore à deux kilomètres lorsque j’émerge au-dessus de la strate arbustive et pénètre dans les estives. Point de sonnaille pour bercer mon arrivée au sommet, les bêtes sont encore au chaud dans la vallée. Seul le léger sifflement du vent froid me cueille dès la sortie de la forêt. Au loin le col apparaît. La neige a totalement disparu. Quelques sommets lointains laissent apparaître quelques pointes blanchis. Le vent souffle maintenant assez fort. Le col est atteint après vingt-six kilomètres d’effort et de plaisir. Plaisir de gravir son premier col de l’année, plaisir de retrouver mes chères montagnes, plaisir d’enfourcher mon vélo dans de si belles pentes. Je savoure et profite de ces beaux paysages d’altitude. Les nuages remontent des vallées de l’Adour, du Louron et d’Aure. Ils donnent aux sommets environnant cette merveilleuse luminosité. Un peu plus bas le village d’Arreau apparaît blotti dans la vallée. Tel un tableau vivant, les couleurs changent très vite. Aimer la montagne s’est aussi savoir profiter de ces moments fugaces qui invitent à la méditation et à la contemplation… 

Le vent glacial me sort rapidement de mes rêveries, il est temps de repartir ! Cette descente de l’Aspin vers Saint-Marie-de-Campan sera pour moi la quatrième du nom. Ma parfaite connaissance des lieux me permet de lâcher les freins. Les villages et hameaux s’enchaînent : Payolle, la Séoube, Sainte-Marie-de-Campan, Campan, Beaudéan, Asté. Je profite de cette belle descente roulante, d’autant que le circulation est réduite à quelques voitures. Le village de Gerde annoncent l’approche sur Bagnère-de-Bigorre. A hauteur du relais des Pyrénées, je lance un petit coup d’œil à droite comme pour saluer Octave, le « Géant du Tourmalet ». Ce dernier passe l’hiver dans la vallée avant de remonter aux beaux jours au sommet du col du Tourmalet où il pourra alors de nouveau accueillir de toute sa hauteur les nombreux cyclistes et touristes qui auront le bonheur de parcourir les pentes de ce très beau col et de se hisser à son sommet. Pour ma part ce sera à l’occasion de la Marmotte Granfondo des Pyrénées. Nous sommes venus lui rendre visite hier avec ma coach, un peu comme un pèlerinage cycliste. Octave semble un peu moins grand que lorsqu’il trône sommet du Tourmalet ! Je l’ai surnommé Octave, car cette statue monumentale commémore le premier passage du Tour de France sur le Tourmalet. Et lors de ce premier passage, le 21 juillet 1910, c’est Octave Lapize qui franchit le premier le col en traitant à plusieurs reprises les organisateurs d’assassins. Mais dans les faits cette statue s’appelle simplement « le Géant du Tourmalet » peut-être en référence au col du Tourmalet qui est lui-même surnommé le « Géant des Pyrénées ».

Je termine cette première sortie avec plus de cinquante-deux kilomètres au compteur et mille neuf mètres de dénivelée positive. J’aurais mis deux heures et trente-deux minutes d’effort pour réaliser cet aller et retour sur l’Aspin, reportage photographique compris. Ma prochaine sortie sera une chasse aux cols au-dessus de Bagnères-de-Bigorre.

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